Jean-Pierre Guillard à La Cantine des Maronites

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Une flopée de Nouveaux Dessins Démodés (dont des jamais montrés), 2 Malones (torsés), un Sprint Bouddha, un Toi-même...
30 œuvres de J-Pierre Guillard exposées à la Cantine dans le cadre du Festival des Canotiers
Inauguration mercredi 30 mai de 18h Jusqu’à tartare.
Au plaisir. J-P.G.
Bio taf-taf de Jean-Pierre Guillard par Jérémie Laplace (2011)
Jean-Pierre Guillard naît sous le signe du blues, le 12/12/60 (=5x12) à minuit moins douze, à Courbevoie. Illico, il est envoyé respirer l’air de la mer. Femme (puis mère) de marins pêcheurs, sa nourrice s’appelle Madame Flèche. Il en gardera le goût durable des parfums portuaires, du vent et des largages d’amarres.
Sur le port Ciguet, sa grand-mère, qui aime chanter et danser, tient un café ouvert au rythme des marées. Il en gardera un goût durable pour l’humidité des zincs, pour les bagarres de saloon, pour les grands chiens noirs sur tabouret de bar, coiffés d’un chapeau, qui boivent, à la paille, des sirops à l’eau. Entre la cour de la maison de sa nourrice et le café du port, le marchant-à-peine Jean-Pierre Guillard est plein d’amour : pour preuve, Madame Flèche rapportera « ce petit-là, il aime le sirop de la rue ». L’enfant est très contemplatif.
Quoique sexué, il n’apprend à faire du vélo qu’à 9 ans, à nouer ses lacets à 11 et ainsi de suite en ce qui concerne toute technologie et tout systématisme. À 11 ans aussi, il se réveille un dimanche matin sans aucun morceau ni de Basie ni d’Armstrong ni d’Ellington ni de Davis ni des Jazz Messengers ni du Modern Jazz Quartet : rien. Son père a quitté le domicile familial avec les disques. Cet enfant aime le jazz, il chante dans le silence les morceaux avec lesquels il se réveillait d’habitude, le dimanche. Le jour de ses 12 ans (le 12/12/72) Jean-Pierre Guillard invente un blues (de 12 mesures, bien sur) sur le piano que marraine Cerisette lui a apporté pour son anniversaire.
Ce même jour en 12, à New York city, Sonny Stitt enregistre un album composé de 12 blues (de douze mesures chacun) intitulé Twelve. Jean-Pierre aura constamment un air syncopé et/ou sentimental sur les levres, sa grand-mère l’appellera dorénavant « la sifflette ».
C’est à 13 ans, à l’occasion d’une tempête sur la Mer noire, que ce garçon fût pris de l’irrepressible bougeotte maritime. Il voulait être sur le voilier par gros temps. Il se dégourdira pour naviguer autant qu’il en rêvait. Sans cesse amoureux d’une jeune fille, ça ne l’empêche pas d’apprendre le saxophone, d’en jouer assez bien assez vite. Révolté, insoumis, exigent, insolent, énervant, son goût de l’expérimentation et des psychotropes lui imposent une scolarité rocambolesque.
Très excité à l’issue d’une visite clandestine dans les ateliers des Beaux-Arts de Paris, il réussit le concours. Aux innocents les mains pleines, il ré-invente la peinture de marine. Attiré par l’irruption de l’abstraction dans la représentation (Klee, De Kooning), par l’ordre secret des rythmes et des couleurs qui font tenir une œuvre debout dans la tempête, il peint immédiatement, éperdument, sans scrupules et sans complexes de grands losanges blancs (non pas vides), (des voiles ?) compressés sur les bords par des couleurs fauvistes.
Plus tard le losange central s’ouvrira, deviendra un entre-deux unissant/séparant des sortes de totems calés sur les limites verticales du tableau (la toile). Jean-Pierre Guillard a quitté sa mauvaise banlieue, habite une chambre de bonne dans le centre, déambule des jours et des nuits dans Paris sans parler à personne, écrit de violents poèmes en marchant (quelques-uns publiés dans la revue Artère) qui rappellent ceux, automatiques, des surréalistes,. Il dresse des typologies urbaines désirantes et savoure de s’y perdre. Jean-Pierre Guillard se dégoûte rapidement de la richesse de la peinture à l’huile et du vain (fat ?) confort psychodramatique de l’école des Beaux-Arts.
Il tente de faire swinguer les matériaux les plus pauvres, les rebuts, les couleurs méprisées. Peu à peu l’entre-deux se peuple de signes qui disparaissent en même temps que le peintre, absorbés par la toile et recrachés derrière. Ce sont les grande toiles (climatiques, dit-il) de 1984 & 85. 1985, année, en effet, de disparitions : son grand amour disparaît, le contenu de son atelier cambriolé aussi (il ne lui reste que les dernières grandes toiles, peintes à une autre adresse), ses références matérielles lui sont dérobées : sa discothèque, sa bibliothèque, ses bronzes africains, sa gravure de Picasso, son chevalet droit, son saxophone. Disons que tout disparaît puisqu’il ne reste matériellement plus rien. Ce sont ces cinq dernières années sans un jour sans peindre qu’il va fuir violemment.
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Cantine des Maronites
6, rue des Maronites, 75020 Paris
Métro : Ménilmontant